Louis Pasteur
La maladie du vers à soie
En 1865, Jean-Baptiste Dumas, sénateur et ancien ministre de l'Agriculture et du commerce, demande à Pasteur d'étudier une nouvelle maladie qui décime les élevages de vers à soie du sud de la France et de l'Europe, la pébrine, caractérisée à l'échelle macroscopique par des taches noires et à l'échelle microscopique par les «corps minuscule de Cornalia». Pasteur accepte et s'installe pour cela à Alès en juin 1865.
Arrivé à Alès, Pasteur se familiarise avec la pébrine et aussi avec une autre maladie du ver à soie, connue plus anciennement que la pébrine: la flacherie ou maladie des morts-flats. Contrairement, par exemple, à Quatrefages, qui avait forgé le mot nouveau pébrine, Pasteur commet l'erreur de croire que les deux maladies n'en font qu'une et même que la plupart des maladies des vers à soie connues jusque-là sont identiques entre elles et à la pébrine. C'est dans des lettres du 30 avril et du 21 mai 1867 à Dumas qu'il fait pour la première fois la distinction entre la pébrine et la flacherie. Il commet une autre erreur : il commence par nier le caractère « parasitaire » de la pébrine, que plusieurs savants (notamment Antoine Béchamp) considéraient comme bien établi. Même une note publiée le 27 août 1866 par Balbiani, que Pasteur semble d'abord accueillir favorablement, reste sans effet, du moins immédiat. Pasteur se trompe. Il ne changera d'opinion que dans le courant de 1867. Victoire sur la pébrine Alors que Pasteur n'a pas encore compris la cause de la maladie, il propage un procédé efficace pour enrayer les infections : on choisit un échantillonnage de chrysalides, on les broie et on recherche les corpuscules dans le broyat; si la proportion de chrysalides corpusculeuses dans l'échantillonnage est très faible, on considère que la chambrée est bonne pour la reproduction. Cette méthode de tri des « graines » (œufs) est proche d'une méthode qu'avait proposée Osimo quelques années auparavant, mais dont les essais n'avaient pas été concluants. Par ce procédé, Pasteur jugule la pébrine et sauve pour beaucoup l'industrie de la soie dans les Cévennes.
En 1884, Balbiani, qui faisait peu de cas de la valeur théorique des travaux de Pasteur sur les maladies des vers à soie, reconnaissait que son procédé pratique avait remédié aux ravages de la pébrine, mais ajoutait que ce résultat tendait à être contrebalancé par le développement de la flacherie, moins bien connue et plus difficile à prévenir. En 1886, la Société des Agriculteurs de France émettait le vœu que le gouvernement examine s'il n'y avait pas lieu de procéder à de nouvelles études scientifiques et pratiques sur le caractère épidémique des maladies des vers à soie et sur les moyens de combattre cette influence. Decourt, qui cite ce vœu, donne des chiffres dont il conclut qu'après les travaux de Pasteur, la production des vers à soie resta toujours très inférieure à ce qu'elle avait été avant l'apparition de la pébrine et conteste dès lors à Pasteur le titre de « sauveur de la sériciculture française ».